« PASS SANITAIRE » ET DROIT SOCIAL : QUE DIRE ?


L’idée de mettre en place un « pass sanitaire » consistant, pour la plupart, à exiger un certificat de vaccination connait un début d’exécution au Sénégal. Elle était balbutiante à l’entame de la première vague où la peur de ce nouveau virus a cédé, au bout de quelques mois, à l’impérieuse nécessité de relancer l’économie et de reprendre de travail. En son temps, le « pass sanitaire » était surtout lié à la production d’un test négatif.
Entre temps, le travail a repris et les restrictions, presque toutes levées. Au moment où l’espoir d’une chute de la pandémie gagnait l’opinion, Delta est arrivé, ce variant du Covid dont la propagation et la nocivité a ramené une rapide excroissance des cas, avec un lot de décès affolant.
Devant cette résurgence de la pandémie, les débats tous azimuts ne laissent aucune matière en rade, pas même le droit. En même temps aussi, le droit est partout ou presque.
Autant pour la première vague l’autorité avait adopté une série de mesures, allant du couvre-feu au port du maque, en passant par l’interdiction des rassemblements, cette fois, pour des raisons qui échappent au débat juridique et à l’objet de la présente contribution, le dispositif restrictif antérieur n’a pas été reconduit, du moins dans ses axes les plus remarquables ; mais « force reste à la loi » et pour paraphraser Lacordaire : « entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui affranchit ».
Le droit social, ce droit si protecteur du maillon faible, c’est-à-dire l’employé, ne saurait s’accommoder de l’obligation induite par le « pass sanitaire ».
En l’état actuel de notre législation sociale, l’employeur est investi de beaucoup de prérogatives liées à l’organisation du travail et aux questions d’hygiène et de sécurité, sans occulter le rôle de « régulateur » de l’inspection du travail et de la sécurité sociale et de l’autorité judiciaire.
Ces prérogatives, d’obédience législative, réglementaire et conventionnelle, ne lui confèrent pas pour autant le droit d’exiger d’un employé de se faire vacciner contre son gré et l’utilisation directe ou indirecte de procédés ou pressions pour l’y obliger est aussi contra legem.
C’est tout le sens de la note ministérielle n° 848 MTDSRI/DGTSS/DRTOP qui rappelle à l’ordre les employeurs qui interdisent l’accès de leurs locaux aux salariés non encore vaccinés. Le Ministre du travail y rappelle, avec vigueur, les limites aux pouvoirs l’employeur sur l’organisation du travail (l’hygiène et la sécurité y compris).
Si telle est la posture du législateur social au Sénégal, il n’en est pas de même ailleurs, particulièrement en France où la question du « pass sanitaire » a été tranchée. En effet, il a été envisagé dans un premier temps le licenciement en cas de non-vaccination. Toutefois, cette possibilité a été écarté le 5 août dernier puisque la rupture anticipée pour non-présentation du « pass sanitaire » a été jugée inconstitutionnelle, même si l’obligation vaccinale et le pass sanitaire a été jugée conforme à la Constitution. En effet, « Dès lors, en prévoyant que le défaut de présentation d’un « passe sanitaire » constitue une cause de rupture des seuls contrats à durée déterminée ou de mission, le législateur a institué une différence de traitement entre les salariés selon la nature de leur contrat de travail qui est sans lien avec l’objectif poursuivi.
Par conséquent, …, le dix-neuvième alinéa du b du 1° du paragraphe I de l’article 1er, qui méconnaît le principe d’égalité devant la loi, est contraire à la Constitution
».
A compter du 30 août 2021, lorsqu’un travailleur soumis à l’obligation de présenter un pass sanitaire ne présente pas les justificatifs à son employeur, il peut, avec l’accord de son employeur, prendre des jours de congés ou de RTT. Autrement, l’employeur lui notifie par tout moyen, la suspension de son contrat de travail.
Au Sénégal, les efforts conjugués du patronat, des autorités et même des salariés seront précieux et décisifs pour réduire la propagation du virus en milieu professionnel et, au-delà, partout au Sénégal, mais d’ici là : N’OUBLIONS PAS LES GESTES BARRIERES.

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